Le toucher après la Covid 19…

Garder une certaine distance les uns avec les autres est parmi les principaux gestes barrières qui nous sont imposés. Impossible, si nous les respectons, d’embrasser ses proches ou de les étreindre. Pourtant, dès son plus jeune âge, l’humain a besoin de toucher et d’être touché. Quelles conséquences peut avoir ce manque de contacts physiques qui pourrait encore durer plusieurs mois ? Pourquoi le toucher est-il (si) important dans nos vies ?

Nous n’avons jamais vécu une situation similaire

Confiner les gens est une pratique ancienne. La distanciation physique me semble plutôt nouvelle. Et c’est assez inédit en plus, vu l’ampleur mondiale du nombre de gens qui sont touchés par ce phénomène.

Dans cette période difficile, nous devons en même temps manifester davantage de soutien de proximité sociale envers nos proches, envers ces salariés « en première ligne » ou auprès des gens que nous côtoyons, et garder une distance physique.

Les conséquences de cette distance physique sur nos rapports amicaux, amoureux ou notre rapport à l’autre tout simplement, vont changer.

Cela change en effet des choses qui, pour nous, sont totalement implicites et donc qu’on ne formule pas. Les études sur la proxémie de l’anthropologue américain Edward T. Hall (théorie développée dans son livre « La dimension cachée » ) montrent que la distance entre des personnes n’est pas la même selon leur relation, si ce sont des amis, des amants ou des gens qui ne se connaissent pas. Cette distance qui se crée, on la vit (de vivre) sans la formuler. Ce que l’on ressent comme étrange aujourd’hui, me semble-t-il, est de voir des amis et de maintenir avec eux une distance d’un ou deux mètres alors que la distance amicale est plutôt à 50 centimètres. On se retrouve un peu dans l’impersonnalité de la prise de parole en public (où la distance est de trois mètres) alors qu’on est dans des relations personnelles. Cela brouille les canaux de communication. Puis, il n’y a pas d’embrassade, d’accolade… Tous les rituels d’entrée en contact sont brisés et on ne sait plus très bien comment se dire bonjour. 

Pour nos rapports amicaux, je crois que cela ne va pas changer beaucoup, car c’est plutôt la qualité de nos rapports amicaux qui est importante. Pour les rapports à l’autre, à l’étranger, à celui qu’on ne connaît pas, cela peut accroître la perception de méfiance. Les signaux que l’on reçoit d’autrui sont importants car nous sommes des individus grégaires, nous appartenons à un groupe. Et d’un autre côté, nous cherchons beaucoup d’informations des autres, des indicateurs : le sourire, le regard… Et effectivement, le masque et la distance réduisent le potentiel des indicateurs dont on peut disposer. Puis le contexte est important : si l’on rencontre un étranger dans un cadre que l’on connaît ou auquel on est habitué, c’est tout à fait différent que si l’on rencontre un étranger dans la rue…

Pour les rapports amoureux, cela ne changera pas pour les gens qui vivent ensemble. En revanche, pour les nouveaux contacts amoureux, les conditions vont apporter de la surprise. Car normalement, le contact répond à des codes qui s’opèrent de façon subtile. Désormais, il va falloir innover ! Je crois que les amoureux potentiels apprécieront ce qui est substitué car on cherchera des indicateurs ailleurs. Il y aura certainement plus de gestes « activés », peut-être davantage d’humour… 

Discussion avec les participants pour retrouver les codes de rencontres amoureuses, dans une époque où on était moins familiers

Conférence à Überlingen (De)

le 31 août 2020, à 19h30

1 réflexion sur « Le toucher après la Covid 19… »

  1. Vous pouvez voir comment cela a fait écho >
    https://isias.lautre.net/spip.php?article1157
    ISIAS Psychologie – « Les impacts du confinement et du télétravail sur la santé mentale, et l’importance psychologique du toucher entravé par les mesures barrières » par Jacques Hallard – mardi 8 décembre 2020, par Hallard Jacques
    Et cela peut aussi être utile >
    https://isias.lautre.net/spip.php?article1342
    « De la colère au ressentiment délétère : comment s’en guérir avec la reconnaissance de la beauté comme source d’émotion esthétique d’après Edgar Morin, sociologue et philosophe de la complexité et Cynthia Fleury, psychanalyste et philosophe de la santé (entre autres) » par Jacques Hallard –
    dimanche 1er août 2021, par Hallard Jacques – ISIAS Philosophie Ressentiment Esthétique – Plan du document : Préambule Introduction Sommaire {{}}Auteur
    Bonnes lectures. Jacques Hallard.

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