La Penthésilée de Heinrich von Kleist

Photo : Philippe Asselin

« Les après-midi de Fonseca »

Médiathèque J.L. Barrault (Avignon)

Le jeudi 12 novembre 2009

Dans Penthesilea, Kleist imagine un épisode fictif de la Guerre de Troie : Penthésilée et ses Amazones — rompant annuellement leur vœu de chasteté à l’occasion de la Fête des Roses — viennent semer le désordre dans les rangs des combattants grecs et troyens. Fondant à la tête de son peuple sur la troupe des guerriers grecs, la reine des Amazones tombe amoureuse de leur chef, Achille. Mais sa fierté et son devoir d’Amazone lui imposent de vaincre son ennemi avant de l’aimer. Sa mère, Otréré, lui avait dit sur son lit de mort :

« Ô vierge des combats, tu ne connaîtras l’homme que captif ou vaincu. »

Au terme d’un combat singulier, dans le lit tumultueux de la bataille, la reine des Amazones

« aidée de sa meute, déchire celui qu’elle aime et le dévore, poil et peau, jusqu’au bout. »

Mais… « n’ayez pas peur, » dit l’auteur dans sa correspondance, « c’est tout à fait lisible ». Marie von Kleist lit la pièce et exprime son sentiment à son cousin. Celui-ci lui répond :

« Tout ce que vous m’écrivez sur Penthésilée me touche au-delà de toute expression. C’est vrai, j’y ai mis tout le fond de mon être (…), à la fois toute la souillure et tout l’éclat de mon âme. » (Dresde, fin de l’automne 1807)

Qu’est-ce qui peut fasciner dans cette tragédie incandescente où Kleist a mis le plus intime de lui-même ? Qu’est-ce qui a pu attirer le lecteur dans ces miroirs — scintillants « comme le saphir et la chrysolithe », illuminés par « la splendeur éblouissante d’Achille, tout revêtu d’airain » ?

Au cours de ces dernières années, nous avons pu suivre six mises en scène ou en espace de Penthésilée :

Matériau-Penthésilée, (2003-2006), à l’Espace Pier Paolo Pasolini, à Valenciennes, par le Collectif Théâtral du Hainaut, dirigé par Nathalie Le Corre et Philippe Asselin.

Faites-les fleurir sous votre bouche, création d’Isabelle Esposito pour la compagnie : « Les semeurs », dans le cadre du Festival de danse « Les jalouses », à l’Étoile du Nord à Paris, en mai 2004.

Pour Penthésilée, une mise en scène d’Éric Lacascade pour La Comédie de Caen en 2005, avec Daria Lippi.

Scènes de chasse, d’après Penthésilée, opéra de René Koering, présenté en création mondiale au Corum, à Montpellier, en mars 2008.

« Brille, scintille et brûle… », par Valérie Paüs, le 23 novembre 2008, au Théâtre Roquille (Avignon).

« Programme Penthésilée-Entraînement pour la bataille finale », de Lina Pros, traduit de l’italien par Jean-Paul Manganaro, le 28 novembre 2008, une mise en lecture publique proposée par le Bureau des Lecteurs de la Comédie Française.

C’est en nous appuyant sur ces manifestations, et sur notre thèse de doctorat : La perversion de l’écriture de H. von Kleist (1996) que nous traiterons ce sujet. Nos propos seront illustrés par des photos de spectacles, et par de la musique de Hugo Wolf, de Othmar Schoeck et de René Koering.

Michèle Jung

Avignon, octobre 2009