La belle ouvrage…

À la fin de Tartuffe, on doit supposer — pour que soit barrée la route du pire — un monarque instruit de toute chose et plein de discernement… Histoire d’entrer en scène ‘’en majesté’’ ! Jean-Claude Fall le fit ici pour nous, dans ce lieu, le 1er janvier 1998.

Le théâtre est grec, le spectacle est romain. Le modèle du spectacle romain, c’est les combats des barbares s’entre-tuant dans l’arène, et l’essence du théâtre grec, c’est la représentation des Perses, dix ans après un épisode historique (Salamine en 480). Dans cette pièce, Eschyle, le poète grec, demande à ses concitoyens de s’intéresser aux vaincus, à la défaite des Perses. D’un côté, la guerre et la peur de la guerre, la fureur et le spectacle des avatars ; de l’autre, la guerre en ce qu’elle fait l’objet d’une ré-appropriation politique. Le théâtre est l’affaire de la Cité et des citoyens, les spectacles sont affaire de clientèle (électorale entre autres).

Tous ces prolégomènes pour situer l’espace stratégique où s’inscrit le CDN-Théâtre des Treize Vents, avec à sa tête Jean-Claude Fall. (J’ai bien dit ‘’l’espace ‘’, parce que l’espace n’est pas seulement un lieu). Dans cet espace, les armes de Jean-Claude Fall ont été ses créations personnelles — avec sa Compagnie, et la programmation qu’il a faite dans le lieu lui même pour poser cet acte citoyen. Il s’y est engagé avec une équipe, ce fut une aventure artistique et… politique, au sens le plus noble du terme.

Victor Scoradet, un auteur/traducteur Roumain, me disait lorsque je l’ai rencontré au Théâtre de Bucarest (j’étais avec Mihaï Maniutiu et nous travaillions sur L’Oubli de Georges Banu) : ‘’Le public ne va pas au théâtre pour oublier le monde où il vit, mais pour le comprendre ‘’. Vous comprendrez donc, ou, mieux dit : C’est ce que j’ai compris en suivant fidèlement, et pour mon plus grand plaisir, les 13 Saisons (des 13 Vents !) de Jean-Claude Fall jusqu’à ce jour.

Aujourd’hui, c’est 2009. Jean-Claude Fall va quitter ‘’Grammont ‘’. Il faut savoir terminer. Au long de ses mandats successifs, il a travaillé à être juste — au sens kleistien du terme. Pour ceux qui n’auraient pas lu Kleist et qui voudraient en savoir plus… rendez-vous dans la soirée, je ne voudrais pas alourdir mon propos.

Bon, Jean-Claude Fall tourne la page, soyons sympas : ne jetons pas le livre ! Car, pour lui, au jour d’aujourd’hui, c’est à dire demain, il s’agit de ‘’se refaire un monde, de hasarder un monde — fût-il fabuleux — en jetant les dés à l’extrême ‘’. Le fil est bandé, il sera fil d’Ariane ou corde raide, et… nous n’en doutons pas : source d’inspiration.

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