Le dire autrement, encore…

"L'amant"

 

dire d’abord,

– projet pour un homme,

une femme

et un livre devant un lit –

et, au lieu d’un narrateur unique, choisir — pour relire La maladie de la mort, de Marguerite Duras — d’opposer un homme et une femme, sans jamais établir de dialogue, le texte n’en prévoit pas :

« Elle demande… »

« Vous dites… »

« Elle sourit… »

« Vous lui demandez… »

Lire à haute voix, c’est la voix qui rend palpable le mystère et la tension de cette rencontre désespérée.

Et entendre :

un homme engage une femme à passer quelques nuits avec lui

, il dit qu’il veut connaître ça, La femme

, des nuits passent ; s’enchaînent

, elle, elle dort

, parfois elle parle.

, lui, essaie de la regarder ;

, parfois il lui donne de la jouissance

, parfois il pleure

, il crie aussi

pendant qu’elle dort

, et toujours, il essaie de la regarder, encore

, et c’est ainsi l’impossible qui s’ouvre devant lui.

 

C’est effectivement l’histoire d’une rencontre, mais on ne sait pas si elle a existé hors de nous-même. Elle a tout simplement lieu dans un conditionnel. C’est peut être une de ces histoires qui sont déjà finies avant même d’avoir commencé. Ici, seulement la volonté de vivre s’affirme — malgré son impossibilité.

En traversant cette histoire, tenter de nommer ce qui paraît innommable, cerner ce qui semble être pour toujours suspendu dans un nulle part.

Ne rien voir.

Ne rien dire.

Ne rien entendre.

Être là.

Prêt ou pas.

Être là.

Pour entendre.

Quelque chose.

Peut-être.

De cette langue de Duras qui fait signe.

 

Ornella, Avignon, le 16 juin 2013